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Le diamant à la conquête de la génération Y

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Le diamant à la conquête de la génération Y

Diffusé en septembre sur YouTube, le spot a bouleversé les codes publicitaires jusqu’alors en vigueur dans le secteur du diamant. Tout commence pourtant de façon très classique : une jeune femme et son compagnon se promènent en barque, le couple court dans un champ de maïs. Ils sont beaux, ils sont amoureux. Sauf qu’à un moment donné on les voit se disputer. « Peut-être qu’on ne se mariera jamais, peut-être que si », conclut la voix off. La jeune femme ne porte pas de bague de fiançailles, mais un pendentif avec un diamant. Un détail ? Dans le monde conservateur des De Beers, Alrosa et Rio Tinto, une révolution. Réunis en association depuis l’an dernier, les géants du secteur ont, avec cette vidéo, lancé une campagne à 17 millions d’euros censée « créer un nouveau mouvement culturel autour du diamant ».

Pendant près d’un siècle, le marché a tout misé sur le slogan « A diamond is forever » (« Un diamant est éternel ») imaginé par De Beers pour relancer les affaires au lendemain de la seconde guerre mondiale. Les millions investis en communication et les prêts consentis aux stars – qui peut oublier Marilyn chantant Diamonds Are a Girl’s Best Friend ? – ont fait du diamant la manifestation concrète de l’amour éternel.

Une communication rajeunie

Longtemps lucrative, la recette montre aujourd’hui ses limites. Entamé en 2014, le fléchissement des ventes de diamants a été notable en 2015, selon un rapport de Bain & Company, tandis que les prix sont au plus bas depuis six ans. En cause, des facteurs d’ordre économique – surproduction, ralentissement de la croissance chinoise – mais également sociologique : la pierre n’est plus en terrain conquis auprès de la génération Y. De nombreux jeunes lui préfèrent les bijoux de seconde main ou les diamants synthétiques, moins chers et plus « propres ». Quand ils ne privilégient pas d’autres produits de luxe, comme la haute gastronomie ou les voyages. Surtout, ils se marient moins, ou plus tard, et ne croient plus guère au conte de fées.

Lire aussi :   Le diamant perd un peu de son éclat

Pour les séduire, l’industrie adapte son discours. En 2015, le joaillier américain historique Tiffany & Co. a choisi des couples hétérosexuels et homosexuels pour incarner sa campagne de publicité. La génération Y prône des marques éthiques ? De Beers soutient Women for Women International, une organisation d’aide aux survivantes de conflits. Menée de concert, l’opération de communication met en scène la chanteuse Diana Krall et l’actrice Michelle Yeoh, parées de diamants. « En montrant ces femmes qui ont réussi et qui achètent elles-mêmes leurs bijoux, la marque évacue toute idée de romantisme », analyse Françoise Hernaez Fourrier, responsable du planning stratégique chez Ipsos.

« UNE FEMME QUI S’ACHÈTE UN DIAMANT, C’EST UN SIGNE D’APPARTENANCE, UNE PREUVE DE SUCCÈS ET D’INDÉPENDANCE FINANCIÈRE. » DELFINA DELETTREZ, CRÉATRICE DE SA GRIFFE

« On note une augmentation des achats réalisés par des femmes pour elles-mêmes, confirme Delfina Delettrez, qui a lancé sa griffe en 2007. C’est un signe d’appartenance, une preuve de succès et d’indépendance financière. » Le diamant descend de son piédestal pour rejoindre les accessoires de mode, ces produits que l’on s’offre quand on en a envie, avant de les remiser au placard.

Ce changement est renforcé par la créativité de la petite joaillerie et l’arrivée d’une nouvelle génération de directeurs artistiques dans les grandes maisons. Pour les uns comme pour les autres, le gros caillou ultra bright a fait son temps. Désormais, le diamant se pose là où on ne l’attend pas. Chez Van Cleef & Arpels, les bagues, ouvertes, encouragent les pierres à se faufiler entre les doigts. Héritière de l’entreprise familiale fondée en 1920, Gaia Repossi a insufflé un esprit rock à la marque en dessinant des bijoux d’oreilles et des bagues articulées, à placer sur la phalange ou à accumuler.

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Anneau de nez de Delfina Delettrez.
Anneau de nez de Delfina Delettrez. DELFINA DELETTREZ

« Nous proposons une nouvelle façon de porter le diamant en l’utilisant non plus comme une fin en soi, mais comme un motif pour accentuer la lumière, le rythme et la composition des bijoux », explique-t-elle. Une approche innovante qui profite aussi aux jeunes couples désireux de sortir du traditionnel solitaire. « Les premières visites chez De Beers sont souvent liées au choix de la bague de fiançailles », rappelle Sidonie Robert-Degove, directrice générale de la marque.

« DE LA MÊME FAÇON QU’ON NE VEUT PAS LE MÊME SAC QUE TOUT LE MONDE, ON NE VEUT PAS LA MÊME BAGUE NON PLUS. » CARINE LARRETGÈRE, CRÉATRICE D’AIMÉE AIMER

Si les jeunes achètent encore des diamants pour célébrer leur mariage, leur amour ou la naissance d’un enfant, ils affectionnent aussi les pièces uniques – De Beers a ainsi lancé un service de bagues sur mesure. « De la même façon qu’on ne veut pas le même sac que tout le monde, on ne veut pas la même bague non plus », résume la créatrice Carine Larretgère, d’Aimée Aimer. « Les clientes ont longtemps préféré à des diamants imparfaits une pierre minuscule en solitaire qui répondait aux quatre “C” : cut, carat, clarity, color [découpe, carat, clarté, couleur]. Ce n’est plus le cas aujourd’hui », observe Christine Meyer, ancienne professionnelle de la joaillerie.

Chez White Bird, les diamants de Cathy Waterman prennent des teintes champagne, cognac ou rosées ; ceux de Brooke Gregson sont coupés à plat. Les tailles en baguette, en rose et aujourd’hui en trillion font leur retour, comme chez Delfina Delettrez. « J’essaie de repousser les limites. Pourquoi les femmes voudraient-elles une bague standard quand elles refusent un amour standard ? » argumente-t-elle. Sa dernière création : un anneau de nez de fiançailles.

 

 

 




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